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Sans contrôle des mines, pas de paix

Le Potentiel - 4 décembre 2008

Kivu
La guerre au Kivu n’est pas une «  guerre politique ». Elle est bel et bien économique pour le contrôle des mines d’étain, d’or, de coltan, de nobium... Toute initiative de paix qui ne consisterait pas à arracher le contrôle de ces mines des mains des groupes armés, serait vouée à l’échec. De nombreux rapports des organes d’observation des ressources naturelles et d’exploitation des minerais sont arrivés à cette conclusion.

Dans un rapport qu’il vient de publier, SARW, Observatoire des ressources naturelles en Afrique australe, un projet d’OSISA, relève que le Rwanda a exporté pour une valeur de 250 millions de dollars en 2008, du coltan, alors qu’ il n’en est pas producteur. L’enquête initiée depuis 2000 accuse tous les groupes armés, toutes tendances confondues, de se prêter à ce jeu malsain et criminel.

Aussitôt après le déclenchement des hostilités le 28 août par le CNDP, Global Wittness est revenu à la charge ; « La participation directe de groupes armés et de l’armée nationale de la République démocratique du Congo à l’exploitation des mines d’étain et d’or dans l’Est du pays menace les efforts de paix. Les tentatives de maintien fragile du programme de paix menées à l’échelle internationale pourraient échouer si elles ne s’intéressent pas aux dimensions économiques du conflit ». Des propos qui rejoignent ceux prononcés dernièrement par Louis Michel, Commissaire européen en charge de Développement et de l’Aide humanitaire, insistant sur le fait que, désormais, il était temps que l’on se penche sur le volet économique de cette guerre.

Global Wittness souligne que «  parmi les groupes armés impliqués dans le commerce des minerais, les plus actifs sont en majorité de Hutus rwandais, dont certains des dirigeants auraient participé au génocide de 1994 au Rwanda. Le désarmement et la démobilisation des FDLR sont primordiaux pour parvenir à une paix durable dans l’ Est de la Rdc. Cependant, pour l’instant, peu de progrès ont été réalisés à cet égard. Les zones contrôlées par les FDLR comptent de nombreuses mines d’or et de cassitérite (minerai d’étain), surtout dans les territoires de Shabunda, Mwenga, Walungu, Uvira et FIZI. Les FDLR utilisent ensuite les bénéfices pour s’approvisionner et maintenir l’activité de leur mouvement. Elles ont élaboré des réseaux commerciaux tellement efficaces et lucratifs qu’ elles n’ont que peu de raison pour partir. La situation est rendue plus complexe par la complicité tacite entre le FARDC et les FDLR ».

Plus important, Global Wittness souligne que les «comptoirs qui achètent ces minerais ne peuvent continuer de clamer leur ignorance. Tout le monde sait pertinemment quels groupes armés contrôlent quels territoires et quelles mines. En s’approvisionnant auprès de ces groupes criminels, les comptoirs leur apportent un soutien effectif ».

Ainsi, il nous revient que pour ce qui est du «  NOBIUM », une société italo-américaine s’en charge pour l’acheter et le faire sortir via le Rwanda. Ce minerai qui intervient dans la fabrication des portables est justement concentré dans la partie solidement contrôlée par le CNDP de Nkunda.

Dangereux commerce

Human Rights Watch est encore plus précise. Elle interpelle les organisations internationales de paix, en mettant un accent particulier sur les efforts que doivent fournir les autorités congolaises. Dans son dernier rapport, cette organisation internationale des droits de l’homme souligne que ce conflit qui a coûté la vie à plus de « 3,5 millions de Congolais est alimenté principalement par le commerce illicite des ressources naturelles. Malgré la réunification du pays, une grande partie du Nord-Kivu reste encore sous le contrôle du groupe pro-rwandais, le RCD-G et maintenant le CNDP qui a pris le relais. Les affrontements visant le contrôle des villes minières ont opposé le RCD-G, les FARDC et les milices Maï Maï. Cependant, les ennemis sur le champ de bataille ont coopéré pour se partager les butins de guerre. Les FDLR contrôlent également les mines et les revenus miniers de façon illégale. Du fait de l’institutionnalisation de la fraude aux frontières avec le Rwanda, d’importantes quantités de cassitérite et de coltan quittent la Rdc sans être enregistrées ni taxées. D’où un manque à gagner pour l’économie congolaise ».

Chiffres à l’appui, Human Rights Watch indique que le « Rwanda pourrait avoir importé une quantité importante de cassitérite au cours des cinq dernières années, soit environ 500 tonnes par an sur la période de 2000-2002 ; 1.400 tonnes en 2003 et autant en 2004 ». Ainsi, ce trafic entretient un dangereux commerce de minerais qui menace effectivement la paix en RDC, particulièrement au Kivu. Pour preuve, les combats se déroulent le plus souvent autour des zones minières en vue du contrôle des revenus lucratifs issus des mines afin d’entretenir des « économies de guerre ».

Pour des solutions durables

« Non seulement la militarisation du commerce des minerais continue de menacer la paix au Congo, mais les Congolais et le pays dans son ensemble se retrouvent privés de revenus dont ils ont a tant besoin pour se reconstruire », conclut Patrick Alley de Global Wittness. Mais, il demande « aux facilitateurs et médiateurs internationaux impliqués dans le maintien du processus de prendre en compte de manière explicite les intérêts économiques des parties belligérantes ». Car, poursuit-il, « jusqu’à présent, cette question a été évitée parce qu’elle était jugée trop sensible ou susceptible de faire échouer les pourparlers de paix. Il s’agit là d’une démarche peu judicieuse à long terme. Si les dialogues internationaux continuent d’ignorer cet aspect critique du conflit, ils ne parviendront pas à trouver des solutions durables ».

En d’autres termes, on peut beau avoir envoyé Olusegun Obasanjo, Benjamin M’kapa pour le compte de l’Onu, Ibrahim Fall par l’Union africaine, on peut metre en oeuvre une force d’interposition européenne dans le cadre de Artémis II, un contingent supplémentaire de 3000 hommes de l’Onu, on peut engager des négociations directes ou indirectes, tant que l’on éludera cet aspect économique, ce trafic illicite des minerais pour soutenir des économies de guerre, les armes continueront à crépiter au Kivu et en RDC. Trêve donc de naïveté. Que faire ?

La panacée réside d’abord en la capacité du gouvernement congolais de mettre effectivement un terme à cette guerre en neutralisant tous ceux qui se cachent dans l’ombre, tirent les ficelles en contrôlant  quelques mines. Ensuite, dans une étroite collaboration hautement responsable avec toutes les organisations internationales, traquer les « faiseurs de conflits » qui achètent et vendent ces minerais au marché international de façon illégale avant de les transférer devant la Cour pénale internationale, ainsi que les éventuelles incriminations d’ordre économique qui seraient constitutives de crimes de guerre, en application du Statut de Rome.

A ce sujet, plutôt que d’envoyer les troupes de la Monuc au front, il faudra les dépêcher dans les concessions minières pour neutraliser tous ces seigneurs de guerre. Et comme l’ont proposé Global Wittness et Human Rights Watch, il y a lieu de réglementer la vente de ces minerais. A l’image du bois et du diamant, il faudra disposer de régime Kimberley en vue de connaître l’origine, le nom du pays producteur et exportateur de ces minerais. S’appuyer enfin sur les mécanismes existants dans le but d’exercer un contrôle réel et efficace, appuyé par des sanctions à l’endroit du Rwanda et de l’Ouganda pour trafic frauduleux de minerais.

Au demeurant, tant que le gouvernement de la RDC, de façon responsable, appuyé par des organisations internationales, n’aura pas repris le contrôle de toutes ces mines pour vendre légalement ses minerais, la paix en RDC sera toujours hypothétique, insaisissable.


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